INTERWIEW| « Et qu'on n'en parle plus ». C'est le titre de son autobio où il s'affiche en ours . Michel Sardou était hier à Bruxelles pour commenter sa vie.
Interview : Xavier DISKEUVE
Depuis hier, à la rédaction, je suis l'homme qui a vu l'ours, en l'occurrence Michel Sard'ours ! Je n'étais pas le seul, le chanteur-comédien recevait la presse au bar du Royal Windsor, à Bruxelles, pour la sortie de son autobiographie.
Qui a décidé de mettre cet ours en couverture du livre ?C'est moi. J'ai trouvé que c'était mon meilleur portrait et que ça reflétait bien une certaine idée qu'on se fait de moi, et qui n'est pas fausse.
Vous vous dites « ours », mais bon, n'est-ce pas le cas de nombreuses, personnalités obligées de se protéger des sollicitations incessantes ?Peut-être un peu, mais moi, ça fait longtemps que je suis comme ça. Volontiers taiseux, aimant être tranquille dans son coin. D'ailleurs mon père, Fernand, était comme ça aussi. Il ne se dévoilait guère. Ce n'était pas un manque d'amour mais il n'en exprimait rien. Une sorte de pudeur. Le fait que mes parents étaient saltimbanques n'aidait pas non plus à ce que je les connaisse bien et qu'on se parle.
Ce qui frappe, c'est que tout le monde a un point de vue sur vous, avec des réactions qui se partagent entre l'évocation de chansons hyperpopulaires et le côté sulfureux qui émane toujours de votre personnage...Les polémiques à mon sujet, je ne les nie pas, mais tout cela me semble exagéré. Il y a des gens qui, trente ans après, me poursuivent toujours pour 4 ou 5 chansons, comme Le France, les Ricains ou Je suis pour, alors qu'il y en a 300 autres. Il faut voir aussi le contexte, l'époque où elles ont été écrites. Voir aussi comment on a mis en exergue certaines phrases. Et puis on n'écrit pas de la même manière à 20 ans, 40 ans et à présent 60. À 20 ans, on ne doute de rien. Je le vois avec les jeunes auteurs avec qui je collabore. Ils se sentent les rois du monde ! J'adore ça...
Vous dites ne jamais avoir lu le pamphlet « Faut-il brûler Sardou ? », sorti en 1978. On peine à le croire...Et pourtant, c'est totalement vrai. Ça ne m'intéresse pas. Même avec le recul, je ne l'ai jamais ouvert. Je n'ai fait que des chansons, après tout, pas de quoi en faire tout un plat.
Vous exprimez à l'égard du métier d'artiste une sorte de sentiment d'ennui...Je ne me suis jamais ennuyé à écrire. Le bon moment, c'est quand on crée la chanson. On est des artisans. Mais tout ce qu'il y a autour, la promotion, faire des courbettes, aller dans des émissions, ça m'a souvent ennuyé. Mais je me suis arrangé pour ne pas devoir en faire trop. Même si ça m'a coûté pas mal d'efforts avant d'y arriver (rires).
Dans le livre, vous ne vous dévoilez en fait que très partiellement...Oui, je me livre un peu, puis... j'arrête ! Mais bon, il faut rester raisonnable, je ne mérite pas une autobiographie de 500 pages ! Je me suis exprimé sur certains sujets personnels, ce qui me semblait important. Je ne voyais pas l'intérêt de parler « boutique ».
Qu'est ce que vous appelez « boutique ? »Parler de la fabrication des chansons. J'en évoque quelques-unes, mais qui ça peut intéresser ? À quoi sert de dire comment on a trouvé telle rime. Et puis les chansons, ça reste un mystère. Malgré les années, je reste bien incapable d'énoncer une règle qui permettrait à coup sûr de créer une bonne chanson.
Dialogue imaginaire avec sa mère Un dialogue imaginaire avec feu sa mère Jackie, c'est le canevas donné par Michel Sardou à ses mémoires, jetées dans le désordre. Né le 26 janvier 1947, le chanteur y raconte ses regrets (ne pas avoir mieux connu ses parents et ses enfants), ses divers mariages et des anecdotes parfois cocasses (une descente de rivière avec Johnny Hallyday). Il s'épanche sur son côté bougon. « J'ai un côté menhir, nous dit-il, mais en dessous, il y a un coeur d'artichaut. »
« Et qu'on n'en parle plus » (222 p., XOeditions)[/