La résurrectionPhilippe Rezzonico
24-02-2008 | 04h00
Un disque et deux spectacles : Michel Fugain est de retour après 12 ans d’absence.
Il était au fond du baril, comme on l’est quand on perd un être cher, la chair de sa chair. Plus le goût de rien. Si, peut-être… Une envie, qui devient une lettre adressée aux confrères. Ils ont répondu. Il y a eu création, disque et spectacle. Et revoilà Michel Fugain, ressuscité.
Au bout du fil cette semaine depuis Paris où il venait d’arriver en provenance de sa Corse résidentielle, Fugain pète le feu et déborde d’enthousiasme. Rien à voir avec le type qui pleurait en 2002 le décès de sa fille de 23 ans aux mains de la leucémie.
C’est pendant ce profond creux de vague qu’il a envoyé une lettre à de prestigieux confrères. La lettre en question, c’était une demande, à défaut d’être une prière. La seule raison qui pouvait inciter Fugain à refaire un disque, c’était de travailler à la base de textes offerts par des gens tels
Sardou, Le Forestier, Aznavour, Nougaro et consorts. Certains étaient de vieux potes, d’autres des confrères croisés au hasard des rencontres et des détours professionnels. Presque tous ont répondu, ce qui a mené au disque Bravo et merci!, qui sortira chez nous mardi prochain, un an après sa parution européenne. Qu’à cela ne tienne, ça nous donnera l’occasion de revoir Fugain sur scène, les 1er et 2 mars, au Théâtre St-Denis, 12 ans après son dernier passage en ville, aux Francos de 1996.
«En gros, je ne m’attendais à rien du tout après avoir envoyé cette lettre, dit Fugain. J’étais en dépression après cet accident de la vie. À ce moment-là, on voit plutôt le verre mivide que mi-plein. Mais il n’y avait pas de pathos dans ma demande.
«Il y a des artistes dont je suis plus proche, comme Françoise Hardy, qui réside près de chez moi, ou
Michel Sardou, avec lequel j’ai commencé dans les années 1970, quand nous étions mômes. Mais j’avais parfois l’impression que l’on ne se connaissait pas assez. En quatre décennies, on croise ces gens-là une dizaine de fois au max. Ça n’empêche pas les démonstrations d’amitié, mais c’est clair que nous avons tous marché en parallèle des autres.»
ASSIMILER LES TEXTES Un à un, les textes se sont rendus. Fugain a lu, assimilé et digéré avant de composer les musiques. Certains, comme
Sardou, lui ont écrit des chansons de potes (Derrière une chanson). D’autres, comme Aznavour, des textes (Je parlerai de toi) qui n’étaient pas destinés a prioriau fondateur du Big Bazar.
«Allain Leprest, quand il a écouté la chanson (Les Imbéciles heureux), il m’a dit: Tiens, j’ai fait une chanson populaire, se souvient Fugain. Pouvais-je m’attendre à quelque chose de Gérard Manset (Ça dure un jour) qui vit presque en ermite? Ça a mené à quelque chose de vivant et à une relation profonde, comme celle avec Yves Duteil (Bravo et merci!) et Véronique Sanson (Alleluia).
Si chaque auteur apportait sa signature particulière, Fugain ne voulait pas coller des mélodies qui pouvaient être celles des auteurs.
«Le texte de Françoise Hardy était un défi, car elle me disait que c’était une mauvaise idée de mettre une musique sur un texte. Elle a sorti un texte qui dormait dans ses tiroirs depuis longtemps. Moi, je voulais lui prouver que le reste de l’aventure, c’était celle du ressort des mélodistes. Lama, il a été surpris du traitement des Amours grigris, sur ce beat pseudo reggae. Et il fallait voir les yeux de Max (Maxime Le Forestier). C’est un bougon, Max, mais il était tout ému. Je me disais: Putain! j’ai niqué Max (grand rire). Moi, ma seule responsabilité avec des textes pareils, c’était de faire les meilleures musiques possibles.